Jean-Jacques Goldman brutalement frappé en plein coeur
Ici Paris n° 2319, 13 au 19 décembre 1989
Catherine Bastien
Retranscription de Linda KUZNICKI.
Il pleure Sirima, la chanteuse qui avait connu la gloire grâce à lui.
[Légende photo] Une immense amitié unissait Jean-Jacques Goldman et Sirima, qui avait débuté en chantant dans le métro.
[Légende photo] La malheureuse a été assassinée par le musicien qu'elle aimait.
[Encart] La belle orientale Sirima refusait qu'on la mette sur un piédestal. Elle aimait la musique et détestait le vedettariat.
Jean-Jacques Goldman, brutalement frappé au coeur, pleure Sirima, la chanteuse qu'il avait découverte dans le métro et qui avait connu la gloire grâce à lui, après leur interprétation commune du célébre tube, Là-bas.
Car la malheureuse a été sauvagement assassinée de plusieurs coups de couteau par son compagnon, Kahatra Sanorith, un musicien raté qui ne supportait pas le succès de la jeune femme. Le corps horriblement mutilé a été découvert à Paris, quai de Valmy, dans le superbe appartement que la chanteuse s'était offert avec ses cachets. Un havre de paix et d'amour qui est soudainement devenu le théâtre d'un drame effroyable.
Depuis sa rencontre avec Jean-Jacques Goldman, la chance avait pourtant souri à Sirima. Sa voix chaude et sensuelle avait conquis un vaste public, tout comme les médias qui la sollicitaient sans cesse. Elle avait aussi noué avec le chanteur des relations amicales, car tous deux se ressemblaient beaucoup.
Affinités
"Comme lui, je parle peu, je ne me lie pas facilement et sors rarement, disait-elle. Et si nous nous sommes si vite compris, c'est parce-que nous avons la même perception de l'existence et de notre métier."
Son amitié, Jean-Jacques Golman la lui rendait bien. S'il était devenu son pygmalion, ce n'était pas le fruit du hasard mais parce qu'il appréciait la puissance vocale de Sirima ainsi que son caractère très entier. Quant à la jeune femme, elle ne se laissait jamais impressionner par la popularité de l'interprète de Je marche seul.
"Chanter avec quelqu'un de connu ne me donne absolument pas le trac, avouait-elle, pas plus que lorsque je chantais avec mes copains dans le métro."
Car Sirima ne reniait pas ses débuts modestes. Au contraire, elle aimait les évoquer. Et pourtant, la réalité avait dépassé ses rêves les plus fous. Venue du Sri Lanka à Paris pour faire de la musique, elle y était parvenue et le monde du showbiz lui avait ouvert ses portes. Mais elle se défendait de vouloir devenir une star et l'affirmait haut et fort :
"Je tiens à ce que le public me connaisse et m'aime uniquement pour ma musique. Je ne veux surtout pas que l'on me mette sur un piédestal, ni que l'on fasse de moi une idole."
Aujourd'hui, Jean-Jacques Goldman ne parvient pas à surmonter son terrible chagrin. Et la blessure ouverte dans son coeur ne pourra jamais se refermer. Si lui a perdu une amie, la chanson française, elle, est en deuil d'une artiste promise à une brillante carriére. D'autant que Sirima venait de sortir son premier album, A part of me, écrit avec la complicité de Philippe Delettrez. Comme elle avait passé toute son adolescece en Grande-Bretagne, elle avait jugé bon de composer ce disque uniquement en langue anglaise. Elle espérait que son public n'en serait pas surpris.
Jean-Jacques Goldman l'avait d'ailleurs encouragée dans cette voie. Il avait même accepté d'y participer, en souvenir de leur duo et du bon vieux temps, et il avait été choriste dans une des chansons, I need to know.
Mais le destin n'a pas permis à Sirima de poursuivre ce conte de fées. Elle est morte à vingt-cinq ans, victime de la jalousie meurtrière de son compagnon.